Solutions et techno

Avec son hub robotisé, Beaumanoir s’offre un nouveau standard pour sa logistique e-commerce

Par Clotilde Chenevoy | Le | Supply chain

Via sa filiale logistique C-Log, le groupe Beaumanoir (Cache-Cache, Bonobo, Bréal, Morgan, La Halle, Caroll) a investi dans la robotique afin d’améliorer la gestion de ses commandes e-commerce. Reportage sur le site de Poupry, près d’Orléans.

Beaumanoir a mis en service 70 robots sur le site de Poupry, près d’Orléans. - © C-LOG
Beaumanoir a mis en service 70 robots sur le site de Poupry, près d’Orléans. - © C-LOG

Des caisses grises pré-remplies de vêtements Cache-Cache, Bréal et Bonobo sont débarquées près des quais. Un convoyeur les achemine vers le transstockeur monumental qui occupe la moitié de la cellule sur la gauche. Ce dernier les engloutit pour les ranger parmi l’un des 60 000 emplacements de cette ruche. Elles seront ressorties selon les besoins vers la seconde partie de la cellule, sur la droite. Cette zone s’organise autour de deux mezzanines. Des petits robots sur la partie supérieure s’occupent de consolider les commandes multi-articles tandis qu’au niveau en dessous, les préparatrices gèrent les emballages. Bienvenue au premier hub digital du groupe Beaumanoir, situé à Poupry, près d’Orléans, qui va devenir le nouveau fer lance de sa logistique e-commerce.

Les marques de Vib’s (Cache-Cache, Bonobo et Bréal) sont les premières à tester le nouvel outil logistique e-commerce. - © C-Log
Les marques de Vib’s (Cache-Cache, Bonobo et Bréal) sont les premières à tester le nouvel outil logistique e-commerce. - © C-Log

Ce site de nouvelle génération doit permettre de diviser par deux le coût de traitement d’une commande e-commerce tout en améliorant les cadences. Les marques de Vib’s - à savoir Cache-Cache, Bonobo et Bréal - , sont les trois marques du groupe qui éprouvent ce nouveau process automatisé et robotisé. Toutes les commandes e-commerce sont traitées en temps réel, avec un cut-off à 19 heures pour une livraison du colis le lendemain avant 10h.

« Soit un gain d’une journée par rapport à l’ancienne gestion depuis les entrepôts bretons, indique Benoît Garçon, directeur général de C-Log, la filiale logistique de Beaumanoir qui chapeaute ce projet. Le hub répond aussi à la problématique de coût car on limite le nombre de fois où l’on touche la pièce. Il y a un rapport de 1 à 4 entre un colis e-commerce et une commande magasin. Avec Poupry, on passe de 1 à 2. » Actuellement, environ 15 000 commandes sont traitées par jour sur la plate-forme, atteignant même un pic à 17 000, avec 70 robots. Après la montée en charge, le hub digital a la capacité de traiter au moins 50 000 commandes avec 200 robots.

Investir dans l’ingénierie, une nécessité

Le site de Poupry pose donc un nouveau jalon dans l’organisation du groupe Malouin. « La logistique, ce n’est plus une personne sur un chariot qui pousse des palettes, souligne le directeur général de C-Log. C’est surtout un service et des technologies. C’est dans cette optique que nous avons choisi d’investir dans notre propre OMS et dans la robotique. Il est essentiel de maîtriser l’ingénierie pour que le savoir-faire ne reste pas chez les intégrateurs ou les fabricants d’équipements. Nous avons d’ailleurs déposé un brevet sur le process mis en place à Poupry. »

Il devient essentiel de maîtriser l’ingénierie car la logistique, c’est du service et des technologies. Nous avons déposé un brevet sur le process mis en place à Poupry.

Cette recherche de maîtrise de la supply chain a été au cœur de la création du groupe Beaumanoir. Le fondateur historique, Roland Beaumanoir, a ainsi investi dès 2002 dans une filiale dédiée à logistique spécialisé sur la mode, les accessoires, le luxe et la maroquinerie. Sur les 130 millions d’euros de chiffre d’affaires de C-Log, 50 % est réalisé avec les marques du groupe qui sont Cache-Cache, Bonobo, Bréal, Morgan, et depuis peu La Halle. Le rachat de Caroll est encore récent et l’intégration se fera pas à pas, « leur supply chain fonctionne bien », assure les dirigeants de C-Log.

L’autre moitié du chiffre provient donc de marques tierces comme SMCP, Damart, Eden Park ou encore Veja. Au total, la branche logistique dispose de 10 sites pour 90 millions de pièces expédiées par an, livrées à 7800 magasins répartis dans plus de 100 pays. « Cette organisation nous permet de financer notre innovation et de baisser les coûts logistiques pour tous nos clients », explique Bertrand Chabrier, directeur du développement de C-Log.

10 millions d’euros d’investissement

En effet, pour ce nouveau projet taillé pour l’e-commerce, le groupe a réalisé un investissement de 10 millions d’euros. Si le robot reste la partie visible de l’iceberg, l’innovation porte avant tout sur le pilotage et la gestion des outils plus que dans les équipements. « Le plus difficile a été le paramétrage de notre OMS (Order Management System ou outil d’orchestration des commandes), indique Benoît Garçon. Il représente la première couche du hub digital. Nous n’avons pas trouvé sur le marché de solutions qui correspondent à nos besoins, que nous pouvions pleinement comprendre et faire évoluer pour rester toujours pertinent dans les années à venir. » L’OMS permet ainsi au groupe Beaumanoir de définir le lieu le plus pertinent d’expédition d’une commande en fonction du stock, de la promesse client et du coût de traitement. La cellule omnicanale née pour ce projet se charge de vérifier la pertinence du modèle.

C-Log a décidé de créer son propre robot pour avoir à la fois exactement les fonctions requises, ni plus ni moins. Une approche nécessaire pour maîtriser l’investissement global. - © C-Log
C-Log a décidé de créer son propre robot pour avoir à la fois exactement les fonctions requises, ni plus ni moins. Une approche nécessaire pour maîtriser l’investissement global. - © C-Log

C’est à Pleudihen-sur-Rance, près de Saint-Malo, que les robots ont été fabriqués, faute là encore de trouver le bon outil sur catalogue. « Nous avons étudié toutes les solutions du marché mais soit le robot n’avait pas les fonctions que nous voulions, soit le coût était prohibitif avec des fonctions sur-capacitaires par rapport à nos besoins, explique Gwendal Buzulier, directeur industrialisation de C-Log. Nous avons attaqué nos développements en partant de l’usage. »

Un robot pour consolider les commandes multi-articles

Ainsi, pour son premier essai robotisé, C-Log n’a pas repris le principe d’un robot déplaçant les étagères comme Amazon Robotics ou Scallog. Il ne déplace pas plus les bacs comme Exotec, mais se rapproche des modèles de Tompkins Robotics, avec un bac qui bascule. Une taille parfaite pour transporter un vêtement tout en gardant un gabarit de robot sobre et léger, qui pèse 2 kilos pour 10 heures d’autonomie.

Des opérateurs se chargent de prendre les articles dans les bacs, avec un tri à gauche pour les commandes unitaires et à droite pour les commandes multi-articles. C’est là que le robot entre en scène. - © Républik Retail
Des opérateurs se chargent de prendre les articles dans les bacs, avec un tri à gauche pour les commandes unitaires et à droite pour les commandes multi-articles. C’est là que le robot entre en scène. - © Républik Retail

L’engin se déplace en lisant les QR Code marqués sur le sol à une vitesse de 1 mètre par seconde, avec la possibilité de monter à 2 mètres par seconde quand les cadences le demanderont. Son rôle consiste à collecter auprès des postes de tri les articles d’une commande e-commerce contenant plusieurs articles. Les robots iront déposer dans un toboggan toutes les références d’un colis. Celles-ci seront ensuite emballées au niveau inférieur.

Si au démarrage l’outil sert pour les commandes B to B, C-Log imagine aussi appliquer le traitement pour des commandes wholesale peu importantes en modifiant la taille du bac du robot. « Nous avons un musée à robots, s’amuse le directeur industrialisation. Nous menons plusieurs tests pour identifier les gains possibles avec la robotisation en partant d’une base de commune. A termes, nous ne fabriquerons pas les machines mais pour démarrer, cela nous permet d’acquérir un certain savoir-faire. » Benoît Garçon assure d’ailleurs que d’autres « quick win » ont déjà été identifiés dans une logique de co-botisation, où le robot vient suppléer l’humain. D’ailleurs d’ici la fin de l’année, les robots seront aussi mis à profit pour le triage des colis par transporteurs. L’avènement des robots chez Beaumanoir ne fait que commencer.

Les robots viennent faciliter le travail des équipes. Ici, l’opératrice s’occupe d’emballer plusieurs articles d’une même commande déposés par les robots via le toboggan bleu. - © Républik Retail
Les robots viennent faciliter le travail des équipes. Ici, l’opératrice s’occupe d’emballer plusieurs articles d’une même commande déposés par les robots via le toboggan bleu. - © Républik Retail