Stratégie retail

Kidkanaï, l’enseigne dédiée à la seconde main de Kiabi, construit son nid

Par Dalila Bouaziz | Le | Concepts

Fin novembre, l’enseigne Kidkanaï dédiée aux produits de seconde main, appartenant à Kiabi, a ouvert son premier magasin à Leers, près de Roubaix. Cinq mois après son ouverture, Républik Retail s’est rendu sur place pour un premier bilan. Reportage.

Kidkanaï est dédié aux produits d’occasion et outlet pour enfants, de 0 à 12 ans. - © D.R.
Kidkanaï est dédié aux produits d’occasion et outlet pour enfants, de 0 à 12 ans. - © D.R.

Il est aux alentours de midi quand nous arrivons dans la zone commerciale de Leers, près de Roubaix. Difficile de rater Kidkanaï, la nouvelle enseigne de Kiabi, avec sa façade jaune et verte. Lancé fin novembre, ce nouveau concept est dédié aux produits d’occasion et outlet pour enfants, de 0 à 12 ans. Textile, jouets, puériculture et librairie, les catégories adressées sont affichées sur la devanture mais aucune mention que l’enseigne appartient à Kiabi.

Première surprise, à l’heure du déjeuner, une queue sur plusieurs dizaines de mètres d’enfants et de parents s’étend à l’extérieur du magasin. Une agence parisienne de mannequins et comédiens organise un shooting d’enfants à la recherche de nouveaux visages pour des marques de luxe (Baby Dior, Louis Vuitton, Givenchy, Lanvin, Zara Kids, Sonia Rykiel…) dans le point de vente. Plus de 200 parents ont ainsi inscrit leurs bambins de 4 à 10 ans, mais on apprendra que le succès était tel que ce sont plus de 381 enfants qui ont été photographiés et qu’il a fallu arrêter dès 15h la file d’attente au lieu de 17h…

Un magasin « dans un bel écrin »

Déjà de l’extérieur, le magasin paraît grand, et lorsqu’on entre sa superficie impressionne pour un magasin de seconde main : 1 200 mètres carrés. L’espace est aéré et le visiteur visualise les différents corners grâce aux panneaux XXL suspendus : la foire aux jouets, la collecte, les essentiels, la petite braderie, les tout-petits, les casse-cou, les graines d’ados… Le mobilier rappelle l’univers de l’enfance avec un code couleur principalement violet, vert et jaune, certains portants sont en forme d’arbres et les cabines d’essayage sont constituées de petits cabanons. Un espace regroupe les trottinettes et vélos, difficile pour les enfants présents de ne pas s’en saisir pour effectuer quelques tours de piste dans ce grand espace !

Dans chaque corner, des messages rappellent les bienfaits d’acheter des articles d’occasion comme « 10 000 litres d’eau pour fabriquer un jean. Alors pourquoi pas l’acheter en seconde main pour limiter l’impact environnemental ». « Nous avons cassé les codes de la seconde main en installant notre magasin ludique et coloré dans un bel écrin, pointe Ismaël El Hamouchi, leader de Kidkanaï. Les produits sentent bons et sont exposés sur de jolis cintres et étiquettes. Il ne ressemble pas à un magasin de friperie, l’image souvent rattachée à l’occasion. Certains clients nous disent oublier qu’ils sont dans un magasin d’occasion ! »

Nous avons cassé les codes de la seconde main en installant notre magasin ludique et coloré dans un bel écrin

Deux systèmes de collecte

Une grande partie du magasin est consacrée au prêt-à-porter avec des rayons bien remplis, classés par âge et couleurs. Dans chaque espace, trois catégories sont proposées : mass market, premium et luxe. Pour s’approvisionner, Kidkanaï collabore avec une trentaine de fournisseurs spécialisés dans la seconde main. Une vingtaine de collectes produits de particuliers sont aussi réalisées par semaine.

Deux systèmes s’offrent aux clients pour déposer et enregistrer leurs articles, via l’application mobile dédiée. « La collecte », où le consommateur estime auparavant à combien son article sera racheté avec trois états possibles (comme neuf & neuf, très bon état et bon état) - et sélectionne la marque. La grille tarifaire est basée sur ceux pratiqués sur les plateformes en ligne comme Vinted, Leboncoin… « A l’ouverture, les clients estimaient nos prix parfois un peu trop élevés donc nous les avons baissés. Ils ont été par la suite trop bas, nous les avons relevés. Nous sommes réellement sur un concept de test and learn ! », précise Ismaël El Hamouchi. Les articles sont ensuite déposés en magasin dans une zone dédiée (la collecte) équipée d’un tapis roulant où l’un des quatre conseillers les contrôle.

Si la vente est concrétisée, le vendeur reçoit un bon d’achat valable dans l’enseigne. « Au démarrage, nous proposions de payer en carte bleue mais nous avons réajusté pour encourager les achats dans le point de vente. Cela a également permis que les huit stands de la Petite braderie soient toujours réservés », précise le directeur de Kidkanaï.

« La petite braderie » offre la possibilité de privatiser un stand (15 euros par semaine) et de fixer ses propres prix, l’enseigne fournit étiquettes et cintres. Une commission de 25 % est prélevée sur les ventes. L’acheteur reçoit la somme récoltée directement par virement. Le record de ventes a ainsi été de 981 euros. En moyenne, les ventes se situent entre 200 à 400 euros, avec une location généralement d’un mois (la 4e semaine est offerte).

Renforcer les jeux, jouets et la puériculture

Le prêt-à-porter est la première catégorie de vente mais le leader de Kidkanaï veut renforcer les autres catégories, génératrices d’un plus grand chiffre d’affaires et de plus fortes marges. « Nous ne sommes pas un magasin textile, nous voulons que l’enseigne propose plus de jeux /jouets, puériculture, mobilité, etc. souligne Ismaël El Hamouchi. Nous accélérons dans les prochaines semaines les collectes au sein de Decathlon Campus, aux magasins d’Auchan Villeneuve d’Ascq, d’Englos et de Leers via des pop-up stores. Nous allons récupérer les produits d’occasion excepté le prêt-à-porter. » L’occasion également de renforcer la visibilité de Kidkanaï dans la région.

Parallèlement en magasin, pour disposer de plus d’objets de mobilité (vélos, poussettes, rollers, skate), l’enseigne les reprend actuellement en payant directement par carte bleue ses acheteurs (et non via un bon d’achat valable).

Une partie outlet en reconstruction

Un espace outlet de produits du quotidien dédié aux articles liés à l’alimentation et l’hygiène a été installé. « Nous allons arrêter la partie alimentaire car nos prix ne sont pas alignés avec ceux de la grande distribution, détaille Ismaël El Hamouchi. A la place, nous proposerons des produits neufs de déstockage, en créant un espace naissance (décoration, mobilier, produits d’hygiène…). » Autre aménagement, les produits premium/haut-de-gamme ont été regroupés dans un corner pour les valoriser et prochainement une catégorie maternité va être créée.

Côté évènementiel, et pour renforcer la visibilité de l’enseigne, trois à quatre ateliers gratuits sont proposés chaque mois pour les enfants (une dizaine par atelier), en présence des parents : le casting enfants évoqué précédemment et prochainement un atelier cuisine et la confection d’un cadeau pour la Fête des mères. « L’idée est par la suite de les faire payer (entre 5 à 10 euros) lorsque l’enseigne sera suffisamment connue en recherchant des prestataires de plus en plus qualitatifs. »

Des débuts prometteurs

Lors d’un jour « normal », le magasin recense 300 visiteurs, et autour de 600-700 lors de l’animation d’un atelier ou durant le week-end. Le panier moyen se situe autour d’une vingtaine d’euros. « Nous sommes situés sur une zone de retail park à proximité de Roubaix et pas loin de Tourcoing. Notre clientèle est plutôt composée de classes populaires à 70 %, les 30 % restant sont des clients plus aisés et sensibles aux enjeux écologiques. » La carte de fidélité (offrant des bons de réduction, promotions, la possibilité de déposer ses articles…) recense 2 800 comptes.

« J’ai créé mon compte d’exploitation en me calquant sur un magasin Kiabi (Ismaël El Hamouchi travaille depuis 17 ans au sein de l’enseigne et était auparavant directeur régional, NDLR) avec une même rentabilité, pointe-t-il. Lors de l’ouverture, nous avons eu fortes retombées médiatiques et cela a été un carton au niveau de mes prévisions de ventes. Néanmoins, Kidkanaï n’a pas la renommée de Kiabi. »

Le responsable a retravaillé sa stratégie marketing, avec des budgets conséquents, notamment sur les réseaux sociaux, pour générer du trafic. « Nous sommes très contents des retours de nos clients sur le concept et d’avoir été les premiers dans le prêt-à-porter à avoir ouvert un magasin de seconde main de cette taille en France. » D’autres magasins Kidkanaï ouvriront donc sous forme de pop-up stores à Auchan Villeneuve d’Ascq et Englos et « certainement par la suite à Paris et en Belgique », conclut Ismaël El Hamouchi.