Stratégie retail

Anthony Afflelou (Groupe Afflelou) : « Magic est un concept avec une offre unique »


Nouveau concept, innovations produits, développement de l’audio, Anthony Afflelou, pdg, nous livre les clés de la performance du groupe familial.

Magic a ouvert rue Beaubourg à Paris. - © Affelou
Magic a ouvert rue Beaubourg à Paris. - © Affelou

Comment se porte le groupe Afflelou ?

La dynamique est extrêmement positive. Les ventes du réseau ont atteint 242,4 millions d’euros au troisième trimestre de l’exercice en cours, contre 229,4 millions d’euros au troisième trimestre de l’exercice précédent. En cumul, les ventes réseau se sont élevées à 711 millions d’euros sur les neuf premiers mois de l’exercice clos le 31 juillet 2025, soit une hausse de 4,9 % par rapport à la même période de l’année précédente.

C’est la troisième année consécutive que nous sommes sur ce niveau de croissance. En France, nous sommes 2 points au-dessus du marché, là aussi depuis environ 3 ans. Sur la partie optique, notre croissance est portée par une croissance organique, avec un développement du chiffre d’affaires des magasins existants et aussi l’ouverture de nouveaux magasins. Et en audio, nous venons d’avoir les premières remontées du marché, et nous sommes à 7 points au-dessus du marché, avec une croissance à 2 chiffres depuis janvier 2025.

Comment expliquez-vous ces performances ?

Notre stratégie repose sur trois points essentiels. Le premier, c’est l’offre et l’équilibre entre les marques mass market du marché et nos marques propres et innovations qui nous apportent de l’indépendance et nous différencient.

Le deuxième axe de croissance, c’est la synergie avec l’audio car 100 % des porteurs d’aide auditive ont besoin de lunettes. Au niveau du groupe, nous avons plus de 600 magasins d’audio, 80 % sont intégrés dans un point de vente optique. Ce rapprochement permet d’augmenter les revenus des deux activités qui se nourrissent.

Enfin, le troisième aspect qui explique notre croissance, c’est la modernisation de nos points de vente. Nous avons d’une part revu notre concept classique avec un nouveau merchandising, l’intégration des corners audio ou encore l’implémentation d’outils digitaux et technologiques, avec comme point d’orgue la télémédecine. D’autre part, nous lançons une nouvelle enseigne Magic.

Vous êtes aussi très fort en communication…

Nous sommes en effet numéro un en termes de notoriété. La communication est clairement le fer de lance de notre enseigne. Preuve en est, beaucoup d’opticiens, pour ne pas dire tous les opticiens, offrent une deuxième paire de lunettes. C’est très commun sur le marché. Mais en 1999, nous avons créé Tchin-Tchin, une marque à part entière dédiée à cette offre, que les consommateurs connaissent et reconnaissent.

Créer des marques et des concepts qui sont autour d’offres universelles et impactantes fait partie de notre savoir-faire. En revanche, la promesse en communication doit être suivie d’une promesse en termes de produits, de conseils et de qualité. Nos magasins doivent être excellents parce que si vous faites venir du monde en vendant du rêve dans le magasin, et que le client ne s’y retrouve pas, vous n’allez pas durer. C’est toute cette chaîne de valeur justement qui nous pousse à l’excellence et à innover en permanence.

En parlant d’innovation, vous venez de lancer une nouvelle enseigne Magic. Quelle est la genèse de ce concept ?

Magic est notre dernière innovation produit, ce sont des lunettes avec clips. Au-delà de répondre à une fonction, les consommateurs peuvent aussi se faire plaisir avec un clip à 29 euros et changer l’esthétique de la lunette. Notre ambition consiste d’ailleurs à ce que les consommateurs pensent immédiatement à Magic quand ils pensent à ce type de produits et donc à Alain Afflelou. Aujourd’hui, nous avons plus de 800 modèles et nous travaillons déjà sur de nouveaux clips pour enrichir la gamme. Elle pèse déjà 35 % de nos ventes. C’est la marque la plus vendue, de loin, dans tous nos magasins, dans le monde entier.

L’ouverture d’un point de vente Afflelou Magic va nous permettre de continuer à croitre et de proposer un nouveau levier de croissance à nos franchisés. Il y a tous les services classiques et l’accompagnement qui nous distinguent, mais nous avons revu le merchandising, en valorisant à fond les clips. Une nouvelle gamme solaire, Magic Sunny, est même lancée pour enrichir encore l’offre.

Vous ne craignez pas la cannibalisation avec votre enseigne historique ?

C’est complémentaire. Nous avons mené un test dans un centre commercial à Marzy, près de Nevers. Nous avons remplacé un ancien Optical Discount, enseigne que nous avons arrêté, par le concept Magic. Il est implanté à 20 mètres d’un Alain Afflelou classique. Au bout de trois mois, le chiffre d’affaires de ce magasin fait le double de l’ancienne enseigne, et l’autre point de vente n’a pas désempli. Ce concept propose une offre unique et une expérience différenciante. Il a fallu deux ans de R&D pour obtenir un produit qualitatif avec un clip qui est invisible, avec des designs très variés.

Avez-vous analysé la clientèle ?

Nous avons en effet analysé la segmentation clientèle, mais c’est encore un peu tôt pour tirer un bilan définitif. Mais concrètement, ce sont 60 % de nouveaux clients qui ne venaient dans aucune enseigne du groupe. La part des 15-34 ans est sensiblement plus forte que dans un magasin Alain Afflelou. Nous commençons à peine, il faudra suivre dans les mois qui viennent l’évolution. Trois prochaines ouvertures sont prévues à Bordeaux, Toulouse et Madrid. J’ai l’ambition d’ouvrir 100 magasins à moyen long terme. Nous devons surtout identifier où le concept fonctionne le mieux et expérimenter aussi d’autres formats, notamment plus petit. Des locaux de 50 à 60m² nous donneraient d’autres perspectives de développement avec un loyer plus raisonnable.

La seconde main représente-t-elle un axe futur de développement ?

De manière générale, la seconde main se développe dans le retail, et de façon assez forte. Donc quelles que soient nos convictions, c’est une tendance de marché. Il faut la comprendre, je pense qu’elle a un bel avenir. Mais selon les produits, le marché de la seconde main sera différent, chaque produit a ses particularités. L’occasion n’est pas dans notre feuille de route RSE. Nous nous attachons plutôt à travailler la durabilité et la recyclabilité de nos produits.

À côté de l’optique, vous le disiez, l’audio est très complémentaire. Quelle stratégie avez-vous déployée sur ce marché ?

En France, nous avons lancé cette activité sous l’enseigne Alain Afflelou Acousticien. Un nom qui explique toute notre stratégie : dédramatiser l’accès à la santé auditive. Car le mot audioprothésiste est plus clivant.

Aujourd’hui, nous avons 430 centres d’audio, dont 330 intégrés à l’offre optique. En Espagne, c’est 200 magasins et 15 en Belgique. Nous avons une année d’expansion record puisque nous aurons 80 centres audios supplémentaires au niveau du groupe cette année. Nous appliquons les mêmes recettes que dans l’optique et cela fonctionne. Au-delà de ces chiffres de développement, nous constatons une mutation du marché et un changement dans la mentalité des gens. Les écouteurs sans fil sont d’ailleurs un vrai bonus pour nous car les gens sont habitués à avoir sur leurs oreilles des appareils. Et les fabricants communiquent largement sur la santé. Certains ont même des fonctions de dépistage auditif.

Vous innovez aussi en communication. Pourquoi cette publicité IA ?

C’est la première fois que nous utilisons l’intelligence artificielle dans notre communication. Nous avons travaillé avec BETC sur le projet. Nous mixons des éléments physiques et nous utilisons un écran de 20 mètres de long pour changer les décors. Cela représente un gain de temps considérable, permet plus de créativité et réduit les coûts car nous visualisons en direct le résultat, sans attendre la post-production.

Plus globalement, quels usages faites-vous de l’IA ?

Nous restons prudents sur l’usage de l’IA car il y a des questions d’éthique et le premier risque souvent pointé est la suppression de l’homme. D’où le fait de rester sur un usage hybride dans notre communication, et également pour garder une dimension authentique. Nous utilisons aussi l’IA de manière concrète, pour tous nos magasins dans la relation clientèle afin de faciliter le partage de bonnes pratiques sur les retours clients ou le SAV. J’ai d’ailleurs été assez surpris parce que les équipes ont très vite pris en main le nouvel outil.

Autre exemple, nous avons mis à profit cette technologie pour analyser la teneur des notes Google et ainsi faire ressortir 3 points positifs et 3 points d’amélioration d’un magasin. Là encore, les équipes se sont emparées de cet outil qu’ils trouvent très ludique et qui leur a servi pour mener des plans d’actions locaux. Il reste difficile d’estimer le potentiel réel de l’IA car il y a des milliers d’applications. Et une fois qu’on y a goûté, on replonge dedans facilement.

En revanche, cette période me rappelle les débuts du e-commerce en 2017-2018, où les débats portaient sur l’urgence de se mettre au e-commerce car les consommateurs n’iraient plus en magasin. Des budgets importants ont été dépensés pour ne pas rater ce tournant. Le magasin n’est pas mort et les prestataires peuvent désormais vous déployer un site en quelques mois. Il convient donc de prendre les choses de façon très pragmatique, et comprendre au fur et à mesure les cas d’usages et identifier comment ils peuvent se déployer.

Retail Days - Atelier-débat : Comment basculer dans une logique de retailtainment ?

Rdv les 29 et 30 septembre à Deauville. - © D.R.
Rdv les 29 et 30 septembre à Deauville. - © D.R.

Dans le cadre des Retail Days, les 29 et 30 septembre 2025 à Deauville, un atelier-débat sera consacré au retailtainment. Bénédicte Chalumeau, directrice de la Communication et des Relations Publiques du Groupe AFFLELOU, partagera sa vision et son retour d’expérience sur les leviers permettant de créer de la désirabilité au-delà du simple coup marketing.

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