Les comportements d’achat bousculent les certitudes du secteur [Etude]
Livraison gratuite relativisée, TV toujours influente, Black Friday préféré aux soldes, fidélisation émotionnelle… Alors que l’omnicanal devient la norme, les usages réels bousculent les recettes établies. Le retail doit composer avec des attentes plus segmentées, plus mobiles, plus exigeantes. Décryptage.

Le parcours d’achat hybride s’impose. Selon une étude OpinionWay menée pour Payplug et PrestaShop, du 6 au 17 janvier 2025 auprès d’un panel représentatif de 1 001 consommateurs français, 60 % des Français naviguent désormais entre les canaux online et offline. Le consommateur de 2025 ne raisonne plus en silos. Il passe de l’écran au magasin sans friction, recherchant une continuité dans son expérience d’achat. Cette hybridation est particulièrement marquée chez les Millennials (48 %) et les CSP+ (46 %) qui veulent des parcours fluides et cohérents. Même les plus jeunes, pourtant réputés « digital native », ne rejettent pas en bloc le magasin physique : la Gen Z, plus indépendante, affiche simplement un moindre attachement au besoin de voir le produit avant achat (-7 pts par rapport à la moyenne).
TV et réseaux sociaux : un duo inattendu dans la conquête client
Si les retailers misaient uniquement sur le digital pour capter les jeunes, l’étude met de la nuance. La télévision reste le premier vecteur d’achat impulsé par la publicité : 59 % des Français déclarent avoir déjà acheté suite à un spot TV - un chiffre qui grimpe à 66 % chez les 18-27 ans. Un signe de la puissance persistante du média de masse.
En parallèle, les réseaux sociaux s’imposent : 78 % des Gen Z y sont influencés par la publicité, 56 % suivent les recommandations d’influenceurs. Le mix média s’étoffe, les arbitrages budgétaires se complexifient.
Black Friday, nouveau Graal promotionnel des 18-34 ans
On le sait mais les soldes d’hiver ou d’été ont perdu de leurs intérêts : pour 29 % des Français, c’est le Black Friday qui compte le plus. Cette bascule générationnelle est spectaculaire : 37 % des Gen Z et 34 % des Gen Y en font leur moment promo préféré.
Ce pic d’attention, court et intensément digitalisé, devient un jalon stratégique dans le calendrier retail. Il reflète une appétence pour les bonnes affaires, mais aussi une temporalité plus en phase avec la consommation rapide, mobile, sans engagement.
Fiches produit : la bataille se joue sur les détails
Visuels soignés (47 %), avis clients (47 %), conditions de livraison et de retour (43 %) : voilà les trois critères les plus scrutés par les acheteurs avant de passer commande. Les plus jeunes, eux, attendent davantage de contenus vidéo immersifs. Les 44 ans et plus cherchent de la transparence : informations sur les stocks, durabilité, délais.
La conversion passe par la confiance, le storytelling utile, et une granularité d’informations personnalisée selon les cibles.
Livraison gratuite : un faux ami pour les clients réguliers
Si 74 % des consommateurs la citent comme facteur d’achat, sa portée réelle varie : elle est jugée essentielle par 77 % des acheteurs occasionnels, mais seulement par 60 % des réguliers. Chez la Gen Z, c’est même la rapidité (26 %) ou l’impact écologique (19 %) qui priment.
Payer pour une livraison express ou responsable devient acceptable si cela a du sens. Le critère logistique se fragmente en offres différenciées, à valeur ajoutée.
Paiement fractionné : une norme en voie de banalisation
Près d’un Français sur deux (48 %) a déjà utilisé le paiement en plusieurs fois. Ce chiffre atteint 64 % chez la Gen Z, 61 % chez la Gen Y mais aussi 53 % chez les CSP+. Ce n’est donc ni une affaire d’âge, ni de revenus. Ce levier de fluidification de l’achat, souvent associé aux fintechs ou au BNPL, devient un standard du retail. Il n’est plus seulement une béquille de pouvoir d’achat, mais un outil de confort transactionnel.
Fidélité : place à l’expérience, à l’émotion, à l’engagement
Les mécaniques classiques résistent : 59 % des consommateurs apprécient les bons d’achat, 48 % les produits offerts. Mais chez la Gen Z, ces leviers cèdent du terrain à d’autres aspirations : 17 % plébiscitent les dons à des associations, 18 % l’accès à des événements VIP, 17 % un support client ultra-personnalisé. La fidélité ne se joue plus uniquement sur la récompense transactionnelle, mais sur la capacité de la marque à nourrir un lien émotionnel, éthique, exclusif.
Pop-up stores : les jeunes veulent vivre leur marque « en vrai »
70 % des Gen Z et Gen Y sont prêts à se déplacer dans un pop-up store de leur enseigne préférée. Ce chiffre monte encore chez les acheteurs à panier moyen élevé (>150 €/mois). Ces formats éphémères incarnent la marque, créent de la rareté et une connivence événementielle. Ils reconnectent l’online au réel, dans un cadre scénarisé.
À l’heure où les foncières se réinventent, ces espaces hybrides deviennent des hubs expérientiels à fort potentiel de conversion.
Mobile, QR codes, IA : la tech séduit les plus jeunes
Le smartphone est le prolongement naturel du parcours d’achat pour la Gen Z : 63 % sont à l’aise avec le paiement mobile en magasin ; 77 % utilisent volontiers les QR codes pour en savoir plus sur un produit ; plus d’un sur deux se montre réceptif à l’essayage virtuel ou aux chatbots alimentés par l’IA.
La technologie n’est pas un gadget : elle est attendue, pourvu qu’elle simplifie l’achat ou enrichisse l’expérience.
Vers une segmentation comportementale, plus que générationnelle
L’étude déconstruit plusieurs idées reçues : la gratuité n’est pas systématiquement un déclencheur d’achat ; les jeunes ne désertent pas les magasins ; tous les consommateurs ne réagissent pas aux mêmes mécaniques de fidélité. Ce que révèle l’enquête, c’est la diversité des attentes selon les usages, les moments de vie, les pratiques. Le levier générationnel reste pertinent, mais il doit être complété par une lecture plus fine des comportements.