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Fnac Darty : « L’agilité prime désormais sur l’optimisation à tout prix »


Face à l’instabilité croissante du marché, Vincent Gufflet, directeur des opérations de Fnac Darty, revient sur les choix logistiques du groupe. Omnicanalité, forecast, flux de seconde vie… Il détaille la transformation de la supply chain en levier stratégique, entre efficacité opérationnelle et résilience.

Vincent Gufflet, directeur des opérations de Fnac Darty. - © Denis ALLARD/REA Denis ALLARD/REA
Vincent Gufflet, directeur des opérations de Fnac Darty. - © Denis ALLARD/REA Denis ALLARD/REA

Dans quelle mesure l’activité de Fnac Darty est-elle omnicanale ?

Nos flux d’activité se font online à hauteur de 25 % à 30 % et les parcours online aboutissent en magasin, via le click & collect, à hauteur de plus de 50 %. Sachant que le business en magasin génère du business online et dans un contexte de relatif déclin du pure retail, nous faisons en sorte d’accroître la rentabilité des magasins. Pour développer de l’omnicanalité, nous nous appuyons sur l’implantation de franchises dans des villes moyennes. Ces nouveaux magasins permettent en effet d’installer la marque dans le paysage des consommateurs et de développer des points de service omnicanaux.

Comment arbitrez-vous sur le bon point d’équilibre entre stocks en magasin et stocks destinés aux flux web ?

Cette question en appelle une autre : jusqu’à quel niveau augmenter la disponibilité des produits permet-elle de générer plus de revenus ? Il y a un équilibre à trouver entre une plus grande disponibilité des produits - que ce soit en e-commerce ou en magasin - et l’immobilisation de cash qu’implique le stock. Accroître le taux de disponibilité en envoyant trop de produits en magasin peut être coûteux financièrement et même en opportunités manquées. En effet ces produits dispersés auront une rotation potentiellement moins bonne que s’ils sont centralisés dans un entrepôt. A l’inverse, rappelons nous que l’indisponibilité est la première raison de non achat en retail !

Sur la vente de certains produits qui fonctionnent par lancements, l’atout le plus fort est la vélocité

Pour connaitre ce point d’équilibre, il faut maîtriser de très nombreux paramètres : les conditions économiques de l’entreprise et de la disponibilité du cash, mais aussi les impératifs du business. Sur la vente de certains produits qui fonctionnent par lancements, l’atout le plus fort est la vélocité. Disposer trop de produits en magasin n’est pas forcément la meilleure manière de vendre vite, même si cela augmente les chances de vendre des accessoires et des services supplémentaires. Résoudre toutes ces équations n’est pas simple, d’autant plus que ces paramètres évoluent dans le temps.

Le Covid a créé des cycles sur certains marchés qui, jusqu’ici, n’étaient pas cycliques

L’instabilité, notamment des tendances de consommation, vous semble-t-elle plus forte aujourd’hui que par le passé ?

Nous devons accepter que nos modèles ne sont plus aussi prédictifs qu’avant. Le Covid a créé des cycles sur certains marchés qui, jusqu’ici, n’étaient pas cycliques. Caractérisé par un fort taux d’équipement, le marché du gros électroménager, par exemple, ne connaissait pas réellement de cycle. Or le Covid a provoqué une forte hausse de la consommation de ces produits. En effet en étant plus présents à domicile, les gens qui n’étaient pas équipés ont eu à cœur de se doter de ce type d’appareils qui simplifient le quotidien et ceux qui étaient équipés ont plus utilisé leurs équipements et ont eu besoin de les remplacer plus souvent. Bousculés par de tels changements, les acteurs du marché sont aussi peu préparés à une hausse qu’au reflux qui lui succède.

Quelle est votre réponse à cette instabilité ?

Nous avons de plus en plus intérêt à privilégier l’agilité sur la sur-optimisation. Cela fait dix ans que tous les forecast sont faux parce qu’ils ne prévoient ni la pandémie, ni la guerre, ni les grèves. Quand ce type d’événement se produit tous les modèles hyper précis volent en éclats. Beaucoup de facteurs font que l’année qui va s’écouler ne ressemblera en rien à ce que l’on avait prévu.

Pour gagner en agilité, il faut accepter de ne pas aller au bout d’un raisonnement d’optimisation qui sera, de toute façon, fondé sur un scénario qui a toutes les chances de ne pas devenir réalité. On ne peut ainsi robotiser intégralement ses entrepôts que si l’on connait bien son activité et que l’on sait la projeter de manière relativement homogène. Les systèmes de mécanisation ne sont pas toujours tolérants aux changements majeurs. Dans cet exemple précis, ne pas optimiser à 100 % consiste donc potentiellement à prendre la décision de conserver une certaine proportion de son entrepôt en racks.

Nous sommes en train d’amorcer un virage important concernant notre outil de forecast d’approvisionnement de magasins

Comment intégrez-vous votre marché de la seconde main dans la gestion omnicanale de vos flux ?

Nous construisons une supply chain qui permet de récupérer les produits, de les faire remonter, de les reconditionner et de les faire redescendre. Ce n’est pas simple avec des outils logistiques et informatiques qui ont souvent été conçus uniquement pour faire descendre. Mille produits neufs de la même référence, ce sont mille produits identiques. Mille produits d’occasion, ce sont potentiellement mille produits différents… Un produit retour ne peut pas être stocké aussi facilement qu’un produit neuf. Il prend généralement plus de place.

Nous avons créé une BU seconde vie il y a trois ans qui a organisé des flux retour de magasin, s’est développé dans des entrepôts, a développé ses processus en mode agile

Quelle organisation avez-vous mise en place pour gérer les flux retour ?

Le plus gros de nos flux du reconditionnement concerne les smartphones. Nous avons pour cela des partenaires qui prennent en charge les produits en sortie de magasin. C’est aussi vrai pour le livre, un secteur dans lequel nous avons traditionnellement de forts flux retour. Nous avons créé une BU seconde vie il y a trois ans qui a organisé des flux retour de magasin, s’est développé dans des entrepôts, a développé ses processus en mode agile. Nous sommes maintenant en train d’intégrer ces flux retour dans notre schéma de transport.

Retrouvez l’intégralité de l’article sur le média Républik Supply