Retail Days automne 2025 : désirable et rentable, le double graal
Deux jours à Deauville, plus de 250 décideurs et une même équation : comment concilier désirabilité et rentabilité ? Entre IA, data, retailtainment et logistique, les Retail Days ont montré que la préférence client se construit dans l’exécution… et dans les rencontres business entre enseignes et partenaires.

Deux jours à Deauville pour une question simple en apparence, mais redoutable dans ses implications : comment séduire les consommateurs tout en tenant les comptes ? Les 29 et 30 septembre, plus de 250 décideurs se sont retrouvés à l’Hôtel Royal pour partager leurs pratiques, confronter leurs choix… et nouer des contacts business décisifs. Car les Retail Days ne sont pas seulement un lieu de débats : ils sont aussi un marché d’opportunités, où enseignes et partenaires échangent en face-à-face pour bâtir les solutions de demain. Derrière les sujets très concrets : service client, data, retail media, magasins, logistique, paiement… une même équation s’impose : la désirabilité attire, mais sans rentabilité, elle ne dure pas et la rentabilité rassure, mais sans désirabilité, elle ne suffit pas !






























Les Assises du Paiement : de la « tuyauterie » à l’expérience
Le paiement sort de l’ombre. Longtemps cantonné à un rôle purement technique, il devient un levier d’expérience et même un champ d’innovation. La fonction, autrefois rattachée à l’IT, se rapproche du marketing et de l’expérience client. Les parcours s’enrichissent : self-checkout, caddies connectés, encaissement mobile. Ils fluidifient l’expérience tout en laissant une place au contact humain. Le paiement fractionné illustre cette évolution : il favorise l’achat et l’upsell, mais il doit être encadré pour préserver la confiance. En coulisses, l’enjeu reste l’orchestration. Multiplier les moyens de paiement, moderniser la monétique, sécuriser les transactions, tout en gardant un monitoring en temps réel : c’est là que se joue l’équilibre entre efficacité opérationnelle et qualité de l’expérience.
Service client : du centre de coûts au levier de confiance
Longtemps réduit à un rôle défensif, le service client change de statut. De SAV vouée à absorber les problèmes, il devient une vitrine digitale à part entière. Connecté aux stocks, animé par des conseillers capables de décider et formés comme des vendeurs, il est piloté sur sa contribution réelle au chiffre d’affaires. Cette évolution transforme la nature même des interactions. Les contacts ne se limitent plus à la résolution d’un problème : ils deviennent proactifs, créateurs de confiance, voire déclencheurs de ventes. Les irritants sont retournés en opportunités, à condition que les équipes aient la liberté d’adapter leurs réponses et d’accompagner le client.
Les dispositifs de visioconseil traduisent ce basculement. Ils recréent, derrière l’écran, l’expertise et la proximité du magasin. L’IA prend en charge les demandes simples, libérant du temps pour ce qui fait la différence : le conseil à forte valeur ajoutée. L’objectif n’est plus seulement la productivité, mais la confiance, qui reste le meilleur carburant de la fidélité.
Data & IA : moins de promesses, plus d’usages
Les promesses technologiques ne suffisent plus : ce qui compte, ce sont les résultats tangibles. Les enseignes qui avancent utilisent la data et l’IA pour fiabiliser ce qui existe déjà. Un moteur de recherche interne plus précis, une segmentation affinée, une fiche produit enrichie : autant de détails qui, mis bout à bout, améliorent directement la conversion. L’IA générative trouve sa place dans des tâches ciblées : trier et recatégoriser des références, générer rapidement des contenus adaptés à des campagnes locales, enrichir les descriptifs produits. Mais son rendement dépend toujours de la qualité des données d’entrée et d’une gouvernance claire. Sans ce socle, les outils produisent plus de bruit que de valeur.
La vraie bataille est organisationnelle. Les enseignes performantes ne cherchent pas à remplacer l’humain mais à le renforcer. La donnée devient un socle partagé, l’automatisation soulage les tâches répétitives, et les équipes peuvent se concentrer sur ce qui fait la différence : arbitrer, conseiller, créer. La performance se mesure moins à la sophistication des algorithmes qu’à leur impact sur la satisfaction, la fidélité et le chiffre d’affaires incrémental.
Retailtainment : créer des moments qui comptent
Le retailtainment n’a pas disparu avec la fin des années fastes. Mais il a changé de nature. L’époque des artifices spectaculaires sans lendemain est révolue. Ce qui fonctionne aujourd’hui, ce sont les expériences ancrées dans une histoire de marque claire, prolongées sur le digital et connectées à une utilité concrète. Le magasin devient une scène vivante : ateliers de personnalisation, concerts intimistes, démonstrations interactives, événements collaboratifs avec des communautés locales. L’expérience réussit quand elle raconte quelque chose de fidèle à l’identité de l’enseigne et qu’elle trouve un prolongement utile, en ligne comme en magasin.
Ce n’est pas le spectaculaire gratuit qui crée la préférence, mais les moments qui marquent et qui font sens. Résoudre un irritant, simplifier un usage, mettre en scène une valeur : voilà ce qui ancre un souvenir positif et renforce la fidélité.
Budgets marketing : arbitrer autrement
La pression sur les marges impose une nouvelle discipline budgétaire. Les arbitrages se font plus serrés, et la question n’est plus seulement de communiquer mais de transformer. Les médias traditionnels reculent, au profit de leviers plus mesurables : influence, affiliation, retail media, contenus orientés usage. L’événementiel, souvent considéré comme une dépense d’image, retrouve une place stratégique lorsqu’il sert l’expérience client et qu’il s’inscrit dans une mécanique de conversion. Les campagnes courtes, réactives, testées rapidement, s’imposent comme plus efficaces que les dispositifs lourds et longs à produire.
Une règle domine désormais : chaque euro doit prouver sa double efficacité, séduire et convertir. Les opérations déconnectées, même créatives, s’épuisent vite. Les campagnes reliées à un parcours clair, elles, créent de la préférence et génèrent du chiffre.
Magasins : ouvrir moins, mais mieux
La course aux ouvertures a pris fin. La question n’est plus combien de magasins, mais pourquoi, et où. Le déplacement doit être justifié par une valeur claire : expérience, service, proximité. Sans cela, les mètres carrés restent des charges sans rendement. Dans un contexte immobilier tendu, les enseignes explorent des pistes plus sélectives : co-implantations, mutualisation de services, implantation dans des lieux mixtes. Le centre-ville conserve son attractivité, mais à condition de proposer un merchandising lisible, une scénographie utile et des services différenciants.
Le magasin reste un lieu de lien social et de confiance, qui dépasse la seule transaction. Mais cette promesse suppose une exigence forte : donner au client une raison valable de se déplacer et maîtriser un coût immobilier souvent déconnecté du potentiel de chiffre d’affaires local.
Retail media et marketplaces : pas sans cohérence
Le retail media est devenu incontournable, mais son efficacité dépend de sa cohérence avec l’expérience client. Mal intégré, il alourdit le parcours et abîme la conversion. Bien pensé, il dynamise le lancement de nouveautés, valorise les marques partenaires et génère des revenus supplémentaires. La mesure, elle aussi, évolue. On ne se limite plus au ROAS : l’embasement, l’impact en magasin, les ventes additionnelles sont désormais pris en compte. Mais cette sophistication impose de clarifier les rôles entre retail media, SEO et SEA. Avec l’arrivée des assistants IA, qui reclasseront les contenus, cette hiérarchie est encore appelée à évoluer.
Le dilemme est simple : comment monétiser l’attention sans nuire à l’expérience ? Les enseignes qui réussissent sont celles qui posent des limites claires, refusant de transformer leur site en panneau publicitaire au détriment de la fluidité.
Livraison : tenir la promesse
La livraison n’est plus seulement logistique. Elle est devenue un marqueur fort de la relation. Les consommateurs attendent moins des promesses flamboyantes que la certitude qu’elles soient tenues. Un délai ajusté mais respecté inspire plus de confiance qu’une promesse de rapidité non tenue. Le colis standard atteint aujourd’hui un niveau satisfaisant. Mais le volumineux reste une zone de fragilité : chaque retard, chaque incident impacte directement la satisfaction. Les solutions qui progressent s’appuient sur plus de transparence, un suivi temps réel et une gestion proactive des problèmes.
Quant à la livraison durable, elle séduit dans les intentions mais reste limitée par le consentement à payer. Le défi à venir sera de concilier rapidité, coûts maîtrisés et durabilité, sans renvoyer la facture uniquement au client.
Au terme de ces deux jours, une évidence s’impose : il n’existe pas de solution miracle. Les enseignes qui avancent ne cherchent pas à opposer humain et IA, expérience et performance, magasin et digital. Elles combinent, elles ajustent, elles arbitrent en permanence. Concilier désirabilité et rentabilité n’est pas une contradiction : c’est une discipline quotidienne. C’est dans cette exigence, patiente et constante, que se joue la vraie préférence.