Stratégie retail

Jouéclub : « Les conditions climatiques ont pénalisé le secteur du jouet au 1er semestre »

Par Dalila Bouaziz | Le | Enseignes

Dans un marché du jouet en recul de 5 % au 1er semestre, Jouéclub reste stable. Les conditions climatiques ont impacté la catégorie plein air, forte en chiffre d’affaires. Jacques Baudoz, dirigeant de la coopérative, reste très confiant sur la période cruciale de Noël. Entretien.

Jacques Baudoz, dirigeant de la coopérative Jouéclub. - © D.R.
Jacques Baudoz, dirigeant de la coopérative Jouéclub. - © D.R.

Comment s’est passé le premier semestre pour Jouéclub ?

Nous sommes plutôt satisfaits. Dans un marché du jouet en recul de 5 % à la mi-août, Jouéclub a connu un premier semestre stable, grâce à une activation promotionnelle importante pendant cette période, mais sans croissance. Cela s’explique par le repli de deux grosses catégories du secteur : le plein air, première catégorie des articles permanents, en raison des conditions climatiques mauvaises dans plusieurs régions et par la catégorie Poupées en régression. L’offre n’a pas été suffisamment forte et pertinente, notamment celle du fournisseur MGA. La dynamique n’a pas été là.Cette famille de produits est liée à des phénomènes de mode ; elle peut donc connaître une accélération ou une décroissance. Néanmoins, nous enregistrons une progression de la fréquentation autour de 1,5 %. Le contexte économique est plus favorable pour ce second semestre. Nous sommes très confiants sur cette fin d’année avec une offre riche en nouveautés et licences, soutenue par des sorties au cinéma fortes.

L’an dernier, nous avons réalisé 500 millions d’euros en 2022. Nous comptons aujourd’hui 283 magasins et 220 adhérents avec une présence en Belgique, Italie, Monaco et au Liban.

Et concernant les ventes en ligne ?

Elles sont toujours autour de 15 % du chiffre d’affaires (site et drive en magasins). Nous constatons une accélération du digital ces derniers mois. Nous avons renforcé nos équipes avec un suivi plus fin à présent de nos acheteurs en ligne. Le live shopping continue à bien fonctionner sur un rythme de deux sessions par mois à partir d’octobre pour présenter les nouveautés jusqu’à la fin de l’année et d’un rendez-vous mensuel le reste de l’année. En octobre, nous présenterons de nouveaux services que nous testons actuellement en interne.

La saison de Noël représente plus de 57 % de nos ventes annuelles, aussi nous engageons des moyens considérables en raison du nombre d’acheteurs durant cette période. Il est donc important de proposer de nouveaux services lors de la sortie du catalogue de Noël.

Parmi vos nouveaux leviers de croissance, vous développez une offre de produits pour les « kids adults ». Qu’en est-il ?

La population adulte est un bon relais de croissance de la population enfant. 27 % des ventes ont été réalisées auprès de cette clientèle en 2022. Nous atteignons aujourd’hui les 30 % du CA sur les produits destinés aux adultes. Cette catégorie est en forte progression car les jeunes adultes jouent beaucoup. Et elle a encore un gros potentiel. Jouéclub a été précurseur dans la communication dédiée à cette population avec un catalogue spécifique lancé en 2021, renforcé en décembre 2022 et encore sur cette saison. Les adultes d’aujourd’hui sont les enfants d’hier qui reviennent en tant que consommateurs adultes. C’est une façon de compenser la baisse de la natalité car mécaniquement il y aura moins d’enfants donc de consommateurs de jouets. En moyenne, le prix d’un jouet enfant est de 17 euros, celui d’un adulte est supérieur à 30 euros…

Nous venons également de développer une gamme senior (jeu de dames, jeu d’échecs, domino, Sudoku…). Des jeux de grande taille, avec une prise en main adaptée… En tant que distributeur spécialisé, nous devons proposer une sélection la plus large possible avec 20 000 références en moyenne dans un magasin (contre 2 000 pour un hypermarché) pour répondre au plus grand nombre de besoins possibles. Notre force est d’avoir une équipe composée de 12 adhérents-sélectionneurs de produits avec un directeur des collections. Ils sont propriétaires de magasins et donc au contact des clients et des fabricants pour aller chercher de nouveaux produits dans le monde entier.

Et concernant l’inflation ?

Cette année, il n’y a pas eu d’augmentation de prix. Ces deux dernières années, nous avons tiré sur la corde pour rester autour de 3 % d’augmentation. Nous bloquons nos prix durant toute la saison de Noël.

En avril, vous avez déployé à grande échelle votre service de seconde main en magasins. Quel bilan faites-vous ?

Ce projet est porté par la jeune génération d’adhérents âgés entre 30 et 40 ans. Ils ont testé et développé le concept et crée le modèle économique, un service de reprise et de revente « troc O’Joué », qui fonctionne et devenu rentable dans leurs points de vente. 130 magasins l’ont depuis déployé et plus de 30 000 clients ont acheté de la seconde main. Le taux de revente est excellent.

En moyenne, trois jouets sont déposés avec une forte proportion de jeux de société, de premier âge et de figurines. Nous voulons atteindre les 70 % de points de vente proposant le « troc O’Joué » en fin d’année et 100 % du parc en 2024. En septembre, nous allons lancer une grande campagne auprès des clients pour les solliciter à ramener leurs jouets en magasin mais aussi auprès de nos fournisseurs afin de récupérer du volume. L’enjeu à présent n’est pas la revente mais la reprise. 

Vous avez repris La Grande Récré en juin dernier, comment se passe l’intégration de l’enseigne ?

2023 est une année charnière pour le groupe. Nous sommes très fiers de représenter les deux marques à la plus forte notoriété. Le démarrage est prometteur avec de belles perspectives.

Dans le projet de reprise, nous avons repris l’ensemble des salariés, y compris les salariés du siège. L’organisation et le pilotage des magasins au quotidien étaient donc déjà assurés par les équipes en place. La différence entre hier et aujourd’hui, c’est que nous apportons évidemment le regard de Jouéclub et la mise à disposition de moyens financiers.

Je suis le président du directoire de la Grande Récré. Francis Ceron est le directeur général pour la partie commerce. Les deux enseignes gardent leurs identités et positionnements. Si l’offre est à 70-80 % identique car nous travaillons avec les mêmes fabricants, la distinction se fait dans la proposition. Jouéclub recense le double de références avec de nombreuses innovations. La Grande Récré a un positionnement plus urbain et dans les centres commerciaux, avec une clientèle plus pressée.

Jouéclub a une implantation plus en périphérie avec une relation plus forte de proximité. Sur le discours de marque, Jouéclub est plus orienté vers la famille avec un choix très large pour toutes les générations, là où La Grande Récré est plus centrée sur l’enfant. Après la première phase d’intégration et de compréhension, nous ferons par la suite des ajustements et modifications de manière à poser vraiment les deux marques avec une différence qui soit celle que ressentent les consommateurs.

La France est le seul pays où il y a autant de magasins de spécialistes du jouet.

La France est le seul pays où il y a autant de magasins de spécialistes du jouet. Nous devons garder cette diversité d’acteurs dans le secteur pour l’intérêt des enfants.