Comment Courir s’appuie sur l’IA pour fluidifier ses flux et accélérer son omnicanal
Face à la croissance rapide de l’enseigne et à la complexité de ses échanges de données entre le web, les magasins et la logistique, Courir a choisi de miser sur l’intelligence artificielle. Objectif : simplifier les connexions entre ses différents outils informatiques et garantir un parcours client fluide, sans couture, tout en gagnant en réactivité et en agilité.

L’enseigne française Courir a été créée en 1980. Spécialisée dans la distribution de sneakers, elle a connu une histoire mouvementée. D’abord filiale de Go Sport (groupe Casino/Rallye), puis rachetée en 2019 par le fonds d’investissement britannique Equistone, spécialiste du redressement et de la revalorisation de marques sous-exploitées, Courir a finalement été reprise en 2024 par le distributeur sportif britannique JD Sports, qui compte 160 magasins en France. En 2019-2020, Courir a réalisé un carve-out complet, c’est-à-dire une séparation totale de ses systèmes d’information (SI) vis-à-vis de ceux de Go Sport, pour fonctionner en autonomie. Depuis, son système informatique est resté distinct de celui de ses actionnaires successifs. À l’occasion d’une refonte de son ERP (progiciel de gestion intégré, le « cœur » informatique qui pilote les achats, la comptabilité, la logistique, etc.), et d’une migration globale de son SI dans le Cloud, Courir a cherché à maintenir des connexions très agiles entre ses applications, avec des échanges de données en temps réel. Une exigence rendue encore plus forte par sa croissance rapide, qui l’a poussée vers des choix technologiques innovants.
Depuis 2019, le business de Courir a fortement évolué. L’enseigne revendique aujourd’hui une position de leader de la distribution de sneakers en France et en Belgique. Contrairement à JD Sports, qui cible surtout les sportifs, Courir vise les passionnés de mode. Sa stratégie repose notamment sur la vente de séries exclusives, parfois recherchées au point de devenir de véritables objets de collection et de spéculation, avec des conséquences jusque dans la cybersécurité (tentatives de fraude ou de revente à grande échelle). Entre 2019 et 2024, le chiffre d’affaires est passé de 350 à 820 millions d’euros, avec une forte expansion internationale. Courir fait aussi évoluer son modèle commercial : il est en train de basculer de l’affiliation vers la chaîne intégrée, modèle désormais dominant.
Une IT désormais 100 % Cloud
Alors que JD Sports fonctionne avec des développements internes et l’ERP Oracle, Courir a fait des choix différents : SAP pour le back-office, Cegid Y2 pour les systèmes de caisses et Salesforce pour l’e-commerce. Ces deux derniers outils sont en SaaS . Initialement, SAP fonctionnait en on premise (hébergé sur les serveurs de l’entreprise). Avec le passage à SAP S/4Hana via l’offre Rise (version modernisée de SAP, hébergée dans le cloud, ici sur Google Cloud Platform), Courir a fermé son dernier datacenter. Résultat : tout son système d’information est désormais dans le cloud public.
« Notre enjeu était de développer des parcours omnicanaux parfaitement intégrés et sans couture », explique Arnaud de La Fournière, directeur des Systèmes d’Information et Projets Stratégiques de Courir. Concrètement, un client peut commencer son achat sur le site web, puis le poursuivre ou le finaliser en magasin, et inversement. « Cela implique de faire travailler ensemble, en temps réel, plusieurs applications très différentes », précise-t-il. Courir utilisait déjà, avant la migration vers S/4, un middleware (couche logicielle permettant de faire dialoguer plusieurs systèmes) fourni par MuleSoft pour gérer ces échanges via API. Il était donc naturel de continuer à s’appuyer sur cet éditeur dans la nouvelle architecture.
De l’IA pour remplacer des API
Lors du déploiement de SAP S/4Hana avec l’offre Rise, il a fallu repenser la connexion de l’ERP au reste du SI, notamment pour répondre aux exigences de l’omnicanal. « Nous avions besoin de redévelopper de nombreuses interfaces point-à-point », c’est-à-dire de réécrire des API spécifiques reliant une application à une autre, se souvient Arnaud de La Fournière. Et chaque nouvelle évolution du SI aurait entraîné de nouveaux développements de ce type. « En utilisant l’IA de Mulesoft, nous pouvons envoyer la bonne information au bon outil en temps réel, sans avoir à développer un plat de spaghettis », explique-t-il, en référence à l’enchevêtrement d’interfaces techniques que l’ancien modèle générait.
Cette approche a montré son efficacité lors du déploiement d’une nouvelle plateforme de gestion des retours ou du remplacement du WMS (Warehouse Management System, logiciel de gestion d’entrepôt). « Nous n’avons quasiment rien eu à faire pour adapter le SI !, se réjouit le DSI. Nous n’avons plus besoin de créer et de maintenir des liaisons une à une, à modifier à chaque changement. » Cette méthode ne supprime pas tout le travail : un paramétrage initial reste nécessaire. Mais l’enseigne reconnaît avoir saisi une opportunité : « Nous n’avions absolument pas pensé à l’IA initialement pour ce cas d’usage », confie Arnaud de La Fournière.
Une approche pragmatique et évolutive
Habituellement, les besoins de Courir étaient couverts par des technologies classiques : API (interfaces techniques), RPA (Robotic Process Automation, automatisation de tâches répétitives via robots logiciels). D’ailleurs, Courir utilisait MuleSoft au départ uniquement avec ces briques technologiques. L’outil pouvait par exemple surveiller les mises à jour de données et les répercuter dans d’autres systèmes. Dernier ajout au SI : le système Avantage, qui assure un suivi permanent des stocks et des livraisons. Grâce à MuleSoft et à l’IA, son intégration a été possible sans redéveloppement complexe de liaisons point-à-point.
Cette nouvelle architecture apporte l’agilité recherchée. Elle fluidifie les parcours clients omnicanaux, mais pas seulement : elle facilite aussi l’accompagnement du fort développement international de Courir, que JD Sports considère comme un pilier de croissance. En France, l’enseigne a sans doute atteint un plafond, mais à l’étranger, le potentiel reste fort. « L’IT doit accompagner le métier en restant agile », juge Arnaud de La Fournière. La donnée joue un rôle central : elle permet de mieux connaître les clients individuellement et de détecter les tendances. « Si un influenceur met en avant un modèle sur les réseaux sociaux, il faut le détecter car cela peut générer un pic de ventes qu’il faut absorber », illustre-t-il. À terme, l’IA pourrait soutenir de nouveaux cas d’usage liés à l’analyse de données.
Retrouvez l’intégralité de l’article sur le média Républik IT