Back Market : « Pour massifier la circularité des produits, il faut aller à la rencontre des gens »
Par Clotilde Chenevoy | Le | Seconde main
Vianney Vaute, co-fondateur de Back Market et chief creative officer, revient sur les enjeux de la dernière levée de fonds et du marché du reconditionné qui explose.
Back Market a finalisé un nouveau tour de table de 450 millions d’euros auprès de Sprints Capital, Eurazeo, Aglaé Ventures, General Atlantic et Generation Investment Management. Cette nouvelle levée de fonds valorise dorénavant l’entreprise à 5,1 milliards d’euros, la faisant rentrer dans le clan des licornes françaises comme Ankorstore ou Exotec. Vianney Vaute, co-fondateur de Back Market et chief creative officer, revient sur les enjeux de cette levée et du marché du reconditionné. Ce dernier explose et la start-up annonce avoir passé la barre des 6 millions de consommateurs, contre 1,5 million en juillet 2019.
Quels sont les enjeux de cette nouvelle levée de fonds ?
Il y en a deux majeurs, à savoir nous accompagner à l’international et développer les services aux marchands. Sur le plan de l’expansion, la levée de fonds nous servira surtout à consolider nos positions. Back Market est présent sur 16 marchés. En Europe, les objectifs sont surtout de développer la notoriété alors qu’aux Etats-Unis, nous investissons à la fois dans les sujets marketing et la supply chain.
Au sujet des services aux marchands, nous pensons pouvoir apporter une vraie valeur ajoutée. Nous leur proposons des solutions pour le service client, des réparations, des solutions logistiques, ou encore des aides pour mieux acheter des pièces détachées. Comme nous sommes sur une verticale, nous pouvons créer des services qui répondent précisément aux besoins du marché, comme le fait de faciliter le changement d’appareil entre une dépose et une reprise. Back Market c’est environ 400 personnes travaillent sur la construction de la supply chain pour que la vente de produits reconditionnés se fasse de façon fiable et professionnelle.
Dans les services, vous évoquez des réparations, mais vous n’avez pas d’ateliers en propre ?
Non, nous passons par des partenaires comme le groupe Save et c’est le cas pour les autres services. Nous ne portons pas de stocks et nous ne réparons pas. Les reconditionneurs s’en chargent. Nous nous sommes aperçus à l’origine de Back Market que ce ne sont pas les capacités industrielles qui manquent mais le fait de rendre ce marché plutôt opaque accessible aux consommateurs avec un gage de réassurance sur l’expertise des acteurs du marché.
Acheter un smartphone reconditionné en Asie reste toujours une opération intéressante d’un point de vue RSE ?
Il y a un fantasme sur l’offre asiatique mais elle ne représente chez nous que 6 % de notre GMV. Nous ne sommes pas un Wish du smartphone reconditionné. Nous avons commencé avec des reconditionneurs français. Puis en nous déployant dans d’autres pays, nous avons aussi ouvert la plate-forme à d’autres acteurs européens. Aujourd’hui, 78 % des 1500 vendeurs partenaires présents sur sa plateforme sont Européens, 4 % sont asiatiques et 18 % américains. Il y un enjeu de volume pour pouvoir passer à l’échelle et ainsi inscrire durablement le reconditionné dans l’esprit des consommateurs.
Calculez-vous l’empreinte carbone de vos produits ?
Il y a deux tableaux à analyser : l’empreinte carbone entre les produits neufs et les produits reconditionnés et notre empreinte à nous incluant la livraison aux clients finals. Les dernières études démontrent que favoriser un produit d’occasion comparé à acheter un produit neuf évite 30 kg d’émissions de carbone. L’Ademe s’est aussi emparé du sujet et nous avons collaboré à une étude sur la réalité globale du marché du reconditionné. Il est intéressant qu’acteur neutre s’empare de ce sujet. Par ailleurs, en 2020, nous avons publié notre premier rapport sur notre empreinte carbone et nous allons chaque année la mesurer pour la travailler.
Vous avez signé également avec des marques en dehors du smartphone. La diversification de l’offre est-elle un axe de croissance ?
Globalement via des opérations de Buy Back, nous cherchons des leads pour que les reconditionneurs accèdent à d’autres offres que les smartphones. La difficulté pour eux est d’arriver à capter ces flux. En 2021, nous avons repris 250 000 produits. Les volumes commencent à monter et c’est comme cela que Back Market s’est mis à vendre des PS4 par exemple.
Nous sommes aussi en contact avec certaines marques qui cherchent des débouchés pour des produits qu’ils ne peuvent plus vendre. Depuis le 1er janvier, ils ont d’ailleurs une obligation réglementaire de trouver un nouveau débouché pour leurs invendus. Devialet, Dyson, le groupe Seb les confient à Back Market qui est aussi une vitrine sérieuse pour la seconde main. Les marques ont une vraie curiosité pour ce marché en plein essor mais elles n’ont pas encore fait la révolution de l’économie circulaire.
Comment se déroule le partenariat avec Carrefour ?
Nous sommes très contents de ce partenariat avec Carrefour qui vient renforcer l’offre de buy back. Nous cherchons à fluidifier au maximum l’expérience client avec des kits et des enveloppes prépayées mais avec les bornes c’est encore plus simple. Un peu comme les piles, les clients peuvent prendre l’habitude de ramener leurs produits, ce qui leur rapporte aussi de l’argent. Si on veut massifier la circularité des produits, il faut aller à la rencontre des gens.
Est-ce un premier pas dans le monde physique avant plus ?
Notre ADN initial consistait à apporter dans une filière très physique l’efficience du digital pour pouvoir accélérer le développement. Depuis 7 ans que Backmarket existe, nous avons en effet constaté lors des différents salons que nous avons fait qu’il y a attrait des clients à nous rencontrer physiquement. Cela rassure certaines personnes de pouvoir toucher et voir. Nous travaillons sur des projets pour nous amener dans le monde réel tout en conservant notre aspect de marketplace.